C’est un générique tout simple qui a marqué toute une génération, qui a suivi les aventures de quatre pré-ados qui avaient la fâcheuse manie de se retrouver embringués dans des histoires policières plus ou moins abracadabrantesques. Le refrain « We are the Famous Five » est tellement ancré dans la mémoire collective, que ceux qui ont connu la série reconnaissent tout de suite de quoi il s’agit et répondent alors à l’unisson « Le Club des Cinq ». Car c’est en effet de la série des années soixante-dix dont nous allons vous parler ainsi que de la musique. Certes, le CD … qui n’existe qu’en France, nous vous dirons pourquoi plus tard … est sorti en 2015. Mais la collection « Télé 80 » éditée sur label français Balthazar Music est telle que la communication est inexistante et il faut alors un coup de chance pour savoir ce qui est sorti dans cette série relativement confidentielle. Et pourtant cette collection mériterait qu’elle eût été plus mise en évidence tant le catalogue regorge de pépites musicales concernant nombre de séries et de dessins animés cultes de cette période … et il y a quelques trésors, parfois inédits comme celui qui nous intéresse aujourd’hui. Malheureusement depuis déjà près d’un an, la production s’est arrêtée. On parle d’un retour en 2019, le temps pour « Télé 80 » de trouver un nouveau label. Mais la très récente réédition en vinyle des titres comme « Goldorak », « Les Cités d’or » (je vous en avais parlé) ou encore « Ulysse 31 » a quelque peu changé la donne, et il est fort à parier que cette collection s’arrête définitivement. Et c’est bien dommage, car il y a bien d’autres musiques de séries et d’animés qui mériteraient de se voir paraître en CD et, pourquoi pas, en vinyle. On va donc évoquer la B.O. du « Club des Cinq » sortie il a trois ans. Mais si nous n’en parlons que maintenant, c’est que 2018 est une année anniversaire. La série ayant été diffusée pour la première fois en 1978, elle est, cette année, quarantenaire. L’occasion alors de parler plus en détail de cette série en elle-même plus loin.

Pour beaucoup, ce qui est retenu d’une bande originale de séries télé, c’est surtout le titre générique, très souvent une chanson. Dans les années 70 et 80 certaines d’entre elles ont, en France, été affublées de chansons originales françaises en lieu et place du générique instrumental original. Ces chansons sont, pour certaines, restées dans la mémoire collective, et pour beaucoup de gens, le générique de « Starsky et Hutch » fait partie de ce qu’ils entonnent en premier. C’est ce même phénomène qui caractérise le générique du « Club des Cinq ». Tous ceux qui ont connu la série pendant leur enfance ont la chanson en tête, notamment ce refrain très facile à retenir « We are the Famous Five » (Nous sommes le Club des Cinq). Mais parfois, certains thèmes instrumentaux présents dans les épisodes de séries et dessins animés ont tendance à s’incruster au fin fond de notre mémoire. L’exemple type est le morceau jazz rock avec un saxo alto qui ouvre tout épisode de « Capitaine Flam », ou le jingle des reportages qui termine chaque épisode des « Cités d’Or », ou encore la musique très rock qui apparaît à chaque scène de combat spatial dans « San Ku Kai ». Pour « le Club des Cinq », c’est beaucoup plus discret. Les musiques intérieures étant très nombreuses et variées (il y en a plus d’une centaine), ce phénomène est nettement moins prononcé. Et pourtant, quelques thèmes nous rappellent des choses si on les réécoute maintenant. Ces musiques qui ont illustré les scènes des séries cultes de l’enfance des quadras et quinquas n’ont pas toutes été éditées à l’époque. Le marché de la bande originale était surtout affaire d’adultes, et peu de musiques de séries et dessins animés ont vu le jour sur un disque … ou une cassette (vous savez ce petit boitier plastique avec des bobines de bandes magnétiques dedans – Si si, çà a existé). Seul Haim Saban avait compris tout l’intérêt de sortir quelques musiques pour un marché encore à défricher. Ainsi les B.O., composées essentiellement par Shuki Levi, se retrouvent éditées. C’est surtout les musiques de « Goldorak », d’ « Albator » et de « San Ku Kai » qui ouvrent le bal en 1978 sur l’album « Les héros de l’Espace » où l’on découvre les thèmes spécialement créés entre autres par Guy Matteoni, Eric Charden ou encore Caravelli. Dès lors, on retrouve « Ulysse 31 », « Les Cités D’or » et bien d’autres. Mais les labels de musiques hésitent, et les B.O. de séries comme « Zora la rousse », « Silas » ou encore « Jack Hollborn », toutes trois signées Christian Bruhn, sont totalement ignorées alors qu’elles existent bel et bien outre Rhin, puisqu’originaires d’Allemagne. Pour ce qui est du « Club des Cinq », c’est complètement différent. Il n’existe nulle part de bande originale, et ce, pour une raison bien particulière que nous développerons plus tard. Seul un 45 tours paraît alors avec la chanson générique réorchestrée et une chanson qui n’apparaît absolument pas dans la série (il faut bien mettre quelque chose sur la face B). Mais aujourd’hui bien des choses ont changé et l’on peut retrouver des B.O. de séries au même titre que pour les films cinéma. Si l’on cherche bien, on peut trouver de nombreuses éditions CD de séries télé, surtout américaine. Depuis quelques années des labels comme Intrada ou La La Land Records nous gratifient d’éditions impressionnantes de diverses séries de toutes époques. Mais l’édition de B.O. de séries anciennes, dont la plupart ne sont plus diffusées, est un pari risqué qui mise essentiellement sur la mémoire du public, et sur la nostalgie de l’enfance lointaine. C’est la parution en DVD de ces programmes ainsi que les sorties en CD de soundtracks de certaines séries américaines qui va inciter à la création de la collection « Télé 80 » dont la vocation est résolument la réédition de ces musiques oubliées qui ont bercé l’enfance de toute une génération.

Alors avant de parler de la bande originale très riche qui constitue celle du « Club des Cinq », on va passer en revue la série, profitant ainsi de l’année 2018 pour revenir sur ce programme culte qui fête alors ses 40 ans (oui, ça remonte). Produite par Don Leaver puis ensuite par Sidney Hayers pour la Portman et Southern Television et diffusée sur ITV, la série TV se base essentiellement sur les romans pour enfants du même titre écrits par Enid Blyton dans les années quarante et cinquante. Les différences entre les années soixante-dix et l’après-guerre étant très peu marquées par l’évolution technologique – les ordinateurs et autres téléphones portables sont encore pour une élite – la production décide alors de transposer l’action dans la décennie courante. Les auditions sont lancées et nombre d’enfants répondent à l’appel. Le premier à être retenu est Gary Russell. Ayant d’abord tourné dans le téléfilm « Phoenix and the Carpet » deux ans auparavant, il se présente pour le « Cub des Cinq ». Il est tout d’abord casté pour jouer François, l’aîné (Julian en VO) alors qu’il voulait au départ le rôle de Mick (Dick en VO). Il ne comprend d’ailleurs pas pourquoi la production insiste pour qu’un brun soit choisi pour ce rôle, alors que les romans le décrivent comme étant blond. C’est l’un de ses amis qui décroche ce rôle tant convoité. L’arrivée de Jennifer Thanisch va changer tout çà. Son incroyable ressemblance avec le personnage d’Annie (Anne) va inciter les producteurs à revoir leur copie, surtout quand Marcus Harris débarque à son tour. C’est en le voyant aux côtés de Gary que les producteurs voient en lui le parfait François. Là aussi la ressemblance avec la description dans les livres, ainsi que les illustrations de l’édition française qui ont fait le tour du monde, est frappante. Marcus est alors choisi pour incarner François au profit de Gary Russell … qui finalement récupère le rôle de Mick … ce qu’il voulait au départ. Étant donné que la série est en coproduction avec une chaîne de média allemande, les producteurs d’outre-Rhin exigent qu’un des enfants soit interprété par un allemand. Mais quand Michele Gallagher arrive pour auditionner, les Britanniques voient en elle l’incarnation pure du garçon manqué de l’équipe, Claudine alias Claude (Georgina / George en VO). Cette gamine aux cheveux mi longs en bataille vêtue d’un blouson de cuir séduit de suite la production qui met en avant une ascendance teutonne de celle-ci afin de l’imposer pour le rôle. Mais comme le contrat exige la présence d’acteurs germaniques, c’est Michel Hinz qui est choisi pour jouer Henri Dorsel (Quentin Kirrin), le père de Claude, et Frederick Von Thun pour incarner M. Rogers, le jardinier, personnage entièrement créé pour la série au profit de la cuisinière qui disparaît alors. Le rôle de Fanny Dorsel, la mère de Claude, est confié à Sue Best dont la carrière est essentiellement télévisuelle, apparaissant ainsi dans de nombreuses séries britanniques.

Pour les acteurs invités, on fait appel à de nombreux autres enfants, dont la plupart n’ont jamais interprété de rôle, mais également à des acteurs confirmés pour jouer les divers méchants … tous adultes d’ailleurs. Ainsi on peut voir parmi toutes ces personnalités, Brenda Cowling que l’on a pu voir notamment dans « Octopussy », « Jabberwocky » ou encore « Pink Floyd The Wall », Geoffrey Bayldon un vétéran des séries TV en tout genre depuis les années cinquante avec quelques apparitions dans « Chapeau Melon et bottes de cuir », « Inspector Clouseau », « Doctor Who », « Les Contes de la Crypte » ou plus récemment « Walking Dead ». Les fans de « Cosmos 1999 » y retrouvent Prentiss Hancock qui fut Paul Morrow, le responsable de la passerelle de la Base Alpha dans la première saison. Ceux qui ont connu la série américaine des 80’s « Le Magicien » et vu le film « Bandits, Bandits » reconnaitront dans un épisode du « Club des Cinq » David Rappaport, le nain qui en incarnait le héros. Apparaissant dans nombre de films et de séries TV, Rita Webb en impose de par sa filmographie qui compte d’ailleurs « Frenzy » d’Alfred Hitchcock, et le grand public français a pu la voir de nombreuses fois dans des épisodes du « Benny Hill Show ». C’est un autre vétéran de la télévision britannique que l’on peut revoir dans « le Club des Cinq » en la personne de Ronald Fraser qui campe Mr Barling et que l’on n’oublie pas puisqu’on l’a vu de nombreuses fois dans « Chapeau Melon et Bottes de Cuir », « Destination Danger », « Les Oies Sauvages », « Doctor Who » ou encore « Les Aventures du jeune Indiana Jones ». C’est également dans le « Club des Cinq » que l’on peut découvrir un tout jeune Rupert Graves dans son deuxième rôle après une apparition dans « le retour du Saint » et qui connaîtra par la suite une florissante carrière cinématographique et télévisuelle. De nombreux guest stars donc, mais surtout issues de la télévision britannique. Si vous avez l’occasion de regarder « Chapeau Melon et Bottes de Cuir », période 70’s avec Purdey & Gambit, vous verrez énormément de visages que vous retrouvez dans le « Club des Cinq ». Mais « Le Club des Cinq » ne serait pas au complet sans le chien Dagobert (Timmy). C’est Toddy, un Border Collie qui est choisi. Ce brave toutou est issu des chiens dressés par Ben Woodgate qui travaille régulièrement avec le cinéma et la télévision. Pour anecdote, ce sont ses deux rottweilers qui terrifièrent le public dans le film « La Malédiction ».

Vient alors le moment de se consacrer à l’apparence donnée aux jeunes héros. Déjà le casting a permis de bien retrouver les personnages. La ressemblance avec le visuel des romans, et notamment ceux des éditions de la bibliothèque rose en France est telle que le relookage a été plutôt facile. Marcus Harris et Jennifer Thanisch n’ont d’ailleurs que très peu été revus. Gary Russel se voit avec simplement une nouvelle coiffure alors que pour Michelle Gallagher, un changement radical s’opère. La jeune fille doit faire son deuil de ses cheveux mi-longs. Une coupe courte vient parachever son look pour devenir le garçon manqué Claude. La petite troupe ainsi préparée les choses sérieuses commencent. Quand le tournage débute, le constat est clair. Les enfants sont loin d’être des acteurs. Jennifer Thanisch est la seule à s’en sortir vu qu’elle est la seule à avoir de l’expérience suite à sa participation à plusieurs autres séries comme « Le Manoir des Fantasmes » (Dark Places) ou encore « Regan » (The Sweeney). Gary Russell se met très vite dans la peau de Mick et livre une prestation de moins en moins bancale. Si Michele Gallagher est mal à l’aise au début, elle s’améliore d’épisode en épisode. Néanmoins, elle a du mal à jouer de façon masculine comme le veut son personnage, car on a peut-être du mal à l’imaginer, mais si son personnage est un garçon manqué, ce n’est pas le cas de la jeune actrice, et parfois le naturel revient très vite. C’est d’ailleurs assez flagrant dans la première saison. Quand Michele doit courir, elle commence par être Claude, mais redevient elle-même au bout de quelques foulées. De plus, dans la seconde saison elle a tendance à rehausser les épaules histoire de se donner une stature plus masculine. Celui qui ne s’en sort vraiment pas du tout est sans nul doute Marcus Harris. Sa prestation, surjouée par moment, est encore plus flagrante dans des moments où il doit interpréter la surprise ou encore l’étonnement. De plus, les capacités physiques qu’il avait vantées lors des auditions sont nettement surestimées.

Alors, comment se fait-il que tous ces jeunes gens aient pu décrocher leur rôle ?

Et bien, en fait, les auditions se résumaient à quelques questions de la part des producteurs. Gary Russell confiera plus tard que quand il a auditionné, on lui a demandé s’il savait nager, faire du vélo ou faire du cheval et bien d’autres choses encore. A aucun moment ils n’ont demandé aux enfants qui se présentaient s’ils savaient jouer la comédie. Gary dût même mentir en prétendant savoir monter à cheval, chose qu’il n’avait jamais faite, puisque l’équitation étant, pour les jeunes garçons, « un truc de filles ». Juste après l’audition, il passa une douzaine de jours le soir après l’école à apprendre grâce à un copain de classe dont la mère dirigeait une écurie. Il alla jusqu’aux sauts d’obstacle afin d’être sûr de pouvoir être pris pour le rôle.

Le tournage de la série est assujetti aux endroits où les prises sont effectuées, certains épisodes se passant dans la maison de Claude, puis l’action se trouvant ailleurs par la suite. Le planning d’une saison est alors établi de telle sorte d’optimiser le temps passé à un endroit donné. De plus, les épisodes eux-mêmes ne sont pas tournés dans l’ordre prévu de diffusion. Le souci dans ce genre de management, c’est qu’il faut tenir compte de certaines choses, et notamment que les cheveux ont tendance à pousser … et c’est assez flagrant sur Michele Gallagher à qui on avait coupé les cheveux assez court. Ainsi on peut voir son personnage avec une certaine longueur de coupe dans un épisode puis la retrouver avec les cheveux plus courts ensuite pour la revoir avec une autre longueur et ainsi de suite. C’est avec la deuxième saison que ce phénomène est encore plus visible. En ayant refusé de se faire une nouvelle fois couper les cheveux, Michele Gallagher apparaît dans les épisodes avec des différences plus marquées cette fois dues à la permanente qu’on lui a faite et qui lâche peu à peu. Le pire est sans nul doute le double épisode « L’or des naufrageurs » où l’on comprend qu’il a été tourné en plusieurs fois à des semaines d’intervalle, compte tenu de trois lieux différents utilisés. Les scènes dans le village portuaire sont tournées en tout début de saison, toutes les scènes du phare, plusieurs semaines plus tard, et l’intro de l’épisode dans la maison de Claude ainsi que dans la cuisine du phare en toute fin de saison. Résultat : au début de l’épisode, Claude a les cheveux longs, puis alterne entre une coupe beaucoup plus courte et légèrement plus longue tout au long de l’histoire. Ce genre de détails mal gérés s’ajoutant à un jeu pas très convaincant de certains enfants, notamment les guests, donnent à la série un résultat assez inégal. Malgré cela la série continue d’être produite sans trop de problèmes. Les acteurs adultes invités pour jouer les différents méchants s’en donnent à cœur joie en se lâchant dans la démesure pour certains. Ainsi quelques-uns d’entre eux accentuent le côté caricatural de leurs personnages, ce qui donne un certain charme légèrement comique surtout quand on met en évidence certains clichés. Les mimiques surjouées et les attitudes interprétées à outrance donnent une certaine valeur aux vilains de service ou à certains rôles secondaires.

Côté cascades, les enfants étaient très peu doublés, ce qui explique les nombreuses questions qui ont été posées à propos de leurs capacités lors des auditions. Seule Michele Gallagher a été doublée par un cascadeur de sa taille pour deux scènes. Claude est censée tomber dans un trou et se rattraper aux mains des autres enfants (« Les cinq et la tour du Contrebandier »). C’est le cascadeur que l’on voit alors en contre-plongée. C’est aussi la même doublure qui sera utilisée pour une scène similaire ou Claude descend dans un tunnel ferroviaire (« Les Cinq et le Train Fantôme »). Alors évidemment, on est loin de leur faire faire des chutes vertigineuses où des combats impressionnants, mais on leur fait faire un petit tour sur une corniche de 30cm de large à une hauteur de 6m avec un simple filet de secours (« Les Cinq et les Saltimbanques ») ce qui se trouve être un calvaire pour Gary Russell qui a une peur panique du vide. On s’en rend d’ailleurs bien compte quand il doit grimper ou descendre d’une échelle. Le montage est tel que l’on peut très vite voir sur son visage qu’il n’est pas rassuré. On fait simuler à l’un des gamins invités une chute de vélo devant une voiture qui lui coupe violemment la route à quelques centimètres (« les Cinq font du camping »). On fait grimper une fillette de onze ans sur un échafaudage de plus de 8m de haut, rouillé et pas très sûr (« Les Cinq et les Tours Rouges »), et bien d’autres mésaventures du genre relativement dangereuses. Heureusement aucun accident n’a été à déplorer. Plusieurs scènes devant se passer en nocturne, c’est la technique très employée de la « nuit américaine » que l’on utilise afin de ne pas avoir d’images trop sombres pour pouvoir être vues sur un écran télé. Mais là où des efforts considérables ont été effectués, c’est dans les plans souterrains, que ce soit dans des grottes ou dans des tunnels. Si tous les plans dans la maison de Claude sont tournés dans la bâtisse où l’équipe de tournage et les acteurs résident, le vaste sous-sol de cette demeure se trouve réaménagé plusieurs fois pour recréer les diverses cavernes, corridors, tunnels et autres passages secrets nécessaires à la narration de certains épisodes. Seul le court plan de la rivière souterraine (« Les Cinq en roulotte ») a dû être tourné sur un site naturel. On notera toutefois un effet spécial utilisé régulièrement tout au long de la série. Il y a un lieu récurrent dans les livres du « Club des Cinq » et qu’il faut mettre en image. L’île de Kernach (Kirrin Island) appartenant à Claude est, par moments, le lieu de leurs aventures. Le problème étant qu’il n’y a aucune île dans les environs des lieux de tournage choisis. Qu’à cela ne tienne, la production décide alors de faire peindre une île sur une plaque de verre qui est placée devant la caméra avec les enfants jouant leurs parties un peu plus loin mimant ainsi le fait qu’il l’aperçoivent au loin (« Les Cinq prennent la fuite »). Ces plans, pourtant très simples avec ce Matte Painting, ont dû être tournés plusieurs fois, car certains des jeunes acteurs se plaçaient derrière l’image peinte de l’île ce qui gâchait la prise. Les plans lointains d’une barque allant vers l’île sont quant à eux beaucoup plus simples à faire. Mais là où on se rend compte du peu de budget alloué à la série est sans nul doute le plan du méchant dans le premier épisode, Johnson, qui saute en parachute pour atterrir sur l’Île de Kernach. Ne pouvant se payer un parachutiste, la production décide de filmer une poupée avec un parachute à son échelle. Même si le plan est fait avec la technique de la nuit américaine, on voit tout de suite qu’il ne s’agit pas d’un vrai bonhomme. C’est également par souci d’économie que la voiture de ce même méchant du premier épisode est réutilisée par deux fois. Tout d’abord au début de l’épisode « Les Cinq et la Tour du contrebandier » où elle amène les enfants chez les Lenoir, mais aussi dans « Les Cinq et le Train fantôme » où elle appartient à M. Andrews, le méchant de l’histoire. C’est tellement flagrant puisque la production n’a même pas eu l’idée de changer les plaques minéralogiques.

C’est en plein milieu du tournage d’un épisode que le réalisateur se rend compte qu’il serait peut-être temps de mettre en boite les plans pour le générique. Il commence alors par demander aux jeunes héros de mettre leur sac à dos, de courir dans un champ et d’aller au loin sans s’arrêter. Ce plan unique totalement improvisé demeure encore à ce jour dans les mémoires de tous ceux qui ont vu la série. Voilà comment, en quelques minutes, on réussit à créer un générique de fin mémorable et efficace. Pour le générique de début, on opte pour des plans inédits. Là où, pour la plupart des séries, on utilise des plans issus d’épisodes variés, on choisit alors pour « Le Club des Cinq » de tourner des séquences dédiées. On commence par filmer Michele Gallagher qui effectue un dérapage relativement contrôlé avec son VTT, puis on filme Gary Russell sur un radeau. Pour ce plan le jeune acteur improvise une chute dans l’eau, ce qui sera gardé par la suite, illustrant bien la personnalité du personnage. C’est lorsque l’on tourne la séquence de Marcus Harris, que la production réalise que celui-ci avait surévalué ses capacités. Sa séquence se limite à courir vers une petite rivière qu’il franchit en se balançant avec une corde … rien de bien compliqué. Il faudra plus d’une vingtaine de prises pour y parvenir, tant Marcus se ratait au moment de s’accrocher à cette fameuse corde … le masque tombe. Mais la séquence qui fait encore scandale en Angleterre est celle de Jennifer Thanisch. La jeune fille est filmée en train de faire du cheval. Jusque-là, rien d’anormal, sauf qu’en Angleterre, il y a des codes vestimentaires à respecter. Si les joueurs de tennis sont obligés de porter du blanc et rien d’autres (regardez le tournoi de Wimbledon, vous comprendrez), les jockeys ont l’obligation de porter une toque (casquette de jockey). Quand le plan est tourné, Jennifer Thanisch se retrouve tête nue, ce qui choque les téléspectateurs britanniques … les adultes surtout.

Quand le tournage de la seconde saison est mis en chantier, près d’un an s’est écoulé. Les jeunes acteurs se retrouvent en juin 1978 après tout le temps de la scolarité où ils n’avaient gardé aucun contact. Le temps ne s’arrêtant pas (c’est une loi immuable de la physique), de grands changements se sont opérés … la puberté a notamment fait son œuvre. Si pour les garçons, ça se résume à gagner quelques centimètres et à se retrouver avec une voix plus grave, pour les filles la différence est quand même plus visible. Si pour Jennifer Thanisch, ça reste minime, c’est en revanche une véritable métamorphose pour Michele Gallagher. Devenues plus matures tant physiquement que mentalement, elles doivent alors être de nouveau totalement relookées. Les jeunes filles ayant pris du volume au niveau de leur poitrine se retrouvent devant un petit problème pour incarner des personnages pré pubères. La production décide alors d’utiliser des bandages qui leur enserrent leurs attributs mammaires afin de parfaire l’illusion. Mais un autre souci se présente. Michele Gallagher refuse se faire de nouveau couper les cheveux. On décide alors de lui faire faire une permanente afin de donner à sa chevelure un aspect plus court. La seconde saison peut alors être tournée.

Pendant les deux ans que prend le tournage, les enfants sont aux petits soins. Ils sont pris en charge par une monitrice qui les materne et on évite au maximum de les froisser. Leur jeune âge ne les ayant pas préparés à certains aspects tragiques de la vie, on évite au maximum de les confronter à des chocs émotionnels. Néanmoins, on ne peut pas tout prévoir. Peu de temps après le tournage de l’épisode « Les Cinq en Roulotte », l’un des acteurs adultes invités, avec qui les enfants s’entendaient bien, se suicide. Etant la première fois que les jeunes comédiens se retrouvent confrontés à un deuil, et ici brutal dû à ce genre de situation, ils sont bouleversés et il faut gérer au mieux ce genre de drame. Leur monitrice ayant elle-même tissé des liens affectifs profonds avec les enfants fait tout ce qu’il faut pour leur permettre de surmonter cette épreuve. C’est également un autre drame qu’il faut leur cacher. Quelques semaines après la fin du tournage de la seconde saison, le chien Toddy qui interprétait Dagobert succombe d’un cancer foudroyant. Afin de ne pas peiner les jeunes acteurs, et surtout Michele Gallagher qui avait tissé des liens avec le chien, le producteur leur cache délibérément la vérité. Durant cette aventure qu’a duré le tournage des deux saisons, l’entente entre les jeunes acteurs est plutôt au beau fixe. Les enfants habitant ensemble dans la même bâtisse louée pour la durée du tournage tissent des liens frères/sœurs et sont relativement complices. Mais comme dans toute relation de type familial, il y a certes des frictions, mais en général c’est assez convivial … à l’exception des deux garçons qui manifestement ne s’apprécient guère. Gary Russel (Mick) déclarera des années plus tard « J’ai toujours pensé que Marcus était une grande gueule arrogante et fouteur de troubles, et pour lui je n’étais qu’un petit nul rampant ». Marcus Harris qui joue François, se vantant d’exploits physiques en tout genre, rabaissait constamment son collègue Gary.

Quand la série est diffusée à la télévision britannique en juillet 1978, elle reçoit le succès escompté. La transposition dans les années soixante-dix permet aux jeunes téléspectateurs de s’identifier plus facilement aux héros. C’est d’ailleurs ce succès immédiat qui a conduit à la production de la seconde saison. Sur les vingt et un romans écrits par Enid Blyton, seuls, dix-huit ont été adaptés. Quand la production décide de commencer une troisième saison, il paraît évident qu’elle ne va pas être entièrement sur les trois derniers livres. De plus, « Le Club des Cinq et le trésor de l’île » ainsi que « Le Club des Cinq et le secret du vieux puits » ne peuvent être adaptés, car les droits sont encore chez « Children’s Film Foundation », une boite de production spécialisée dans les films pour enfants (ces deux titres n’ont d’ailleurs finalement jamais été adaptés par eux). Alors on décide de créer de nouvelles aventures, comme ce fut maladroitement le cas en France pour continuer la série de romans dans la bibliothèque rose. C’est d’ailleurs à cause de ces livres français de basses factures narratives que les héritiers d’Enid Blyton, alors déçus par ces nouveaux écrits, décident de créer une société pour gérer les droits de ses œuvres ainsi que les adaptations qui pourraient en découler. Ils refusent alors catégoriquement qu’il y ait une troisième saison avec des histoires originales, de peur de retrouver la même basse qualité que les livres français. La série télévisée s’arrête donc en plein succès. En France c’est fin 1978, que « Le Club des Cinq » est diffusé pour la première fois dans l’émission « Les Visiteurs de Noël », déclinaison pour les fêtes de fin d’année de la célèbre émission « Les Visiteurs du Mercredi », qui fit les beaux jours de l’après-midi du milieu de semaine de la chaîne TF1. Rediffusée plusieurs fois, notamment dans une autre émission culte de TF1 « Croque Vacances », la série voit sa dernière apparition sur les petits écrans en août 1990 sur Antenne 2. Cette version française qui reste dans les mémoires avait subi quelques modifications notamment sur le générique. Allez savoir pourquoi, les images sont inversées (effet miroir) et l’indicatif est raccourci, enlevant le titre de l’épisode et en coupant la dernière phrase de la chanson. C’est une voix off qui donne le titre en français ce qui est inexistant dans la V.O. De plus les noms des personnages ne sont pas les mêmes que dans la version anglaise. En effet, quand Hachette édita dans la Bibliothèque Rose les romans du « Club des Cinq », une francisation des noms a été effectuée. Ainsi François est la VF de Julian, Claude prend la place de George, Mick pour Dick et Annie pour Anne et ainsi de suite. Il faut donc créer des subterfuges pour la série. Par exemple, c’est un dialogue hors champ que l’on entend dans le premier épisode quand Johnson, le méchant de l’histoire, consulte le dossier du père de Claude. Le nom original « Quentin Kirrin » apparaissant alors, il devient nécessaire d’adapter ce plan pour la version française. Et donc, on peut entendre Johnson : « Professeur Quentin Kirrin … Ah oui, il s’est installé avec sa famille sous le nom d’Henri Dorsel ». Et hop, le tour est joué. Mais la version française souffre d’une qualité de doublage qui est loin d’être à la hauteur. Les enfants qui doublent les jeunes héros ainsi que les guests sont très loin d’être naturels, accentuant ainsi le jeu bancal des acteurs originaux, et surtout Marcus Harris. Néanmoins, le jeune public français devient très vite accro à cette production britannique, tant et si bien qu’elle est devenue une sorte de Madeleine de Proust.

Quand la série est mise en chantier, le tournage est certes essentiel, mais il ne faut pas oublier la partie post production. Bien sûr le montage est l’un des processus primordial puisqu’on choisit les meilleures prises de chaque plan qu’on met bout à bout afin de donner le rythme qui convient aux diverses scènes. C’est d’ailleurs ainsi que l’on voit les erreurs de tournage comme les longueurs de cheveux qui ne cessent de changer au cours d’un épisode, ou encore un blouson qui disparait miraculeusement des épaules d’un enfant pour réapparaître de manière tout aussi magique le plan suivant. C’est aussi avec le montage que l’on peut se rendre compte que Gary Russell est acrophobe. Dans « Les cinq s’amusent bien » Mick descend par une échelle de corde. Un plan en plongée montre alors Gary Russell, mais on ne voit pas son visage jusqu’au moment de la coupe de ce plan … qui est fait un dixième de seconde trop tard. Le jeune comédien lève la tête et fixe la caméra et on voit bien la peur panique qui se lit sur son visage. Dans « Les Cinq et l’Or des naufrageurs » les enfants montent à une échelle. Gary est le premier à grimper. Là aussi, la coupe de ce plan arrive trop tard, car on constate que Gary se fige brusquement, tétanisé. Il y a bien d’autres exemples encore. Côté son, il faut aussi donner une ambiance propre à la série et la musique est alors l’atout majeur. Dans les années soixante-dix, il y avait deux manières de pister les épisodes d’une série. Bien évidemment, quand on en produit une, on fait très souvent appel à des compositeurs pour créer les morceaux qui vont illustrer des scènes ou simplement des ambiances qui seront réutilisées de nombreuses fois. Il y a des séries qui sont indissociables de leur compositeur. Que serait « Cosmos 1999 » ou encore « Les Sentinelles de l’Air » sans Barry Gray ? On ne peut imaginer « Les Envahisseurs » sans Dominic Frontiere ou « Galactica » et « Buck Rogers » sans Stu Philips. La plupart des séries policières américaines sont pistées par les musiques de Mike Post et Pete Carpenter. On trouve parfois quelques grands noms de la musique de film avec par exemple Lalo Schifrin pour « La planète des Singes » ou Leonard Rosenthal pour « L’âge de cristal ». Seulement quand une série a un budget limité, les producteurs ont recours à une autre tactique : puiser dans les catalogues des labels d’illustration musicale.

Lors de diverses chroniques précédentes, nous avons déjà utilisé ce terme sans vraiment expliquer de quoi il s’agissait. Le concept d’illustration musicale est assez particulier, mais permet à des productions à petits budgets de pouvoir s’offrir une identité sonore à moindre coût. Que ce soit des petits films, des chaînes de télévision ou radio, ou encore des documentaires, les musiques alors utilisées sont issues de disques ou de bandes magnétiques que l’on dit « libre de droit ». Cette mention n’est pas tout à fait vraie. Quand on utilise ces musiques, c’est déjà que l’on a acheté le support physique au label. On a ensuite l’obligation de créditer dans les génériques le(s) compositeur(s) ou au minimum la provenance en mentionnant le copyright de l’éditeur. Plusieurs labels existent dans ce genre très particulier, et leurs éditions en disques, cassettes (bobines de bandes magnétiques dans les 50’s) et CD se classent en plusieurs sous genres. On trouve alors des disques de jazz, de rock, de jingles, de morceaux dramatiques, comiques, angoissants, orchestraux, classiques, électroniques … bref tout un panel réparti sur des centaines de références par éditeurs. Seulement voilà, si vous allez chez un disquaire, vous risquez d’être un peu perdu. En effet, aucune de ces productions musicales n’apparait dans un bac. Elles ne sont vendues QU’AUX radios, chaînes de télévisions ou boite de productions. Le seul moyen d’en trouver est de fréquenter les disquaires d’occasions qui rachètent des lots issus de ces mêmes boites et chaînes de médias. L’un des réalisateurs à utiliser assez assidument les catalogues d’illustration musicale est sans nul doute George Romero. Si vous trouvez des B.O. de certains de ces films vous verrez très souvent qu’il y a de nombreux compositeurs crédités. Le cinéaste n’engageait pas de compositeurs et puisait allégrement dans les bandes magnétiques du Label Capitol Records, notamment pour « La nuit des Morts Vivants » ou encore « The Crazies ». Ce n’est que depuis « Zombie » et sa collaboration avec Dario Argento que sa méthode va peu à peu changer. Argento le convainc d’utiliser la musique originale de Goblin en plus des titres issus du label Dewolfe Records. Il fait de même pour « Creepshow », voulant utiliser des musiques de Capitol Records. C’est son assistant-réalisateur, John Harrison qui lui fait remarquer que le succès des films comme « Halloween » ou « Fog » est en partie dû à la musique de John Carpenter. Il le convainc alors de le laisser rajouter des thèmes électroniques pour étoffer l’ambiance musicale de « Creepshow ». Il y a de nombreux autres exemples d’utilisation d’illustration musicale. Les plus anciens d’entre nous se souviennent peut-être du célèbre interlude d’Antenne 2 mettant en scène, dans un dessin animé, des petits « 2 » et « A » sur des lignes de cahier d’écoliers. Leurs aventures étaient alors ponctuées par de courts morceaux électroniques. Très marquantes, ces compositions étaient signées Jean-Jacques Perrey (co-compositeur du cultissime « Pop-Corn ») et interprétées par sa fille Pat Prilly. Peu de gens le savent, mais ces petites pépites musicales sont toutes issues du label français Montparnasse 2000 avec des albums consacrés aux synthétiseurs Moog. Pour certaines séries américaines comme britanniques, les producteurs engageaient des compositeurs attitrés, mais parfois ceux-ci ne livraient pas assez de morceaux pour illustrer les diverses scènes. C’est pourquoi plusieurs parties sont pistées par de l’illustration musicale. Ainsi pour « l’âge de Cristal » et « le prisonnier », on trouve de nombreux extraits du catalogue Chappell Records, l’un des éditeurs les plus représentatifs de ce domaine particulier. Dans les années soixante-dix, en Angleterre, on avait tendance à ne composer une musique originale (ou une chanson) que pour les génériques. Toutes les musiques intérieures étaient alors une immense réutilisation de musiques issues des labels Chappell, Kpm, mais également Bruton Music. C’est avec les séries « Prisoner Cell Block H » et surtout « Regan » (The Sweeney) que ce phénomène est le plus flagrant, car les musiques utilisées sont les mêmes dans les deux productions. C’est d’ailleurs beaucoup de morceaux de ces deux séries que l’on retrouve également dans la B.O. du « Club des Cinq »

Pour la B.O. du « Club des Cinq », il apparaît évident que le budget engagé pour la production de la série ne pouvait couvrir la composition de morceaux originaux. Il est clair qu’il va falloir une centaine de petites musiques destinées à illustrer les scènes nombreuses et variées qui s’enchaînent. Mais il faut pourtant avoir une identité propre, ne serait-ce que pour le générique. C’est à Rob Andrews qu’est confié la mission de composer la chanson titre et à Les Spurr le soin d’en écrire les paroles. Les deux hommes réussissent à livrer une chanson dont les paroles sont relativement simples à retenir, surtout le refrain, et dont le thème musical reste aisément dans les mémoires. Encore aujourd’hui, ceux qui ont connu la série dans leur enfance se souviennent de ce générique et entonnent sans problème « We are the Famous Five ». Pour les musiques intérieures, il est clair que ce ne sont pas ces jeunes musiciens sans grand palmarès qui vont se coller à la composition. C’est là où les producteurs décident de faire ce qu’ils avaient déjà fait avec « Regan » (The Sweeney), en piochant sans retenue dans le catalogue de deux labels anglais d’illustration musicale KPM Music, mais surtout Bruton Music. Plusieurs styles musicaux en ressortent suivant les scènes. Et si la plupart des moments sont résolument orchestraux, on y trouve néanmoins quelques passages jazz rock et prog rock teinté parfois de funk le tout entrecoupé de parties électroniques minimalistes. Ce patchwork stylique fonctionne à merveille. Les moments sombres et angoissants sont illustrés par des musiques orchestrales ou électroniques calmes, caverneuses ou encore ambiantes. Les scènes plus joyeuses sont ponctuées de morceaux plus légers et les rares moments d’action ou de poursuite sont rythmés par des compositions toutes aussi vives. Ce grand mélange met alors en lumière des compositeurs dont la plupart n’ont fait carrière QUE dans l’illustration musicale, car très lucratif. Avec Steve Gray, on oscille entre deux genres très différents. Tantôt on entend des musiques orchestrales très « musique de film », tantôt on découvre des parties plus électroniques et parfois jazzy. Ce musicien de studio très polyvalent s’est distingué notamment en jouant dans des sessions d’enregistrement pour Quincy Jones, Henry Mancini, Michel Legrand, Lalo Schifrin ou encore Samy Davis Jr. John Cameron, lui aussi à l’aise dans de nombreux styles, offre à la musique du « Club des Cinq » plusieurs titres orchestraux relativement calmes, comme son compère John Scott, qui par la suite deviendra un compositeur reconnu pour le cinéma avec par exemple la musique de « Greystoke », « King Kong 2 » et de nombreux épisodes de Cousteau. Mais si la production n’utilise que très peu de morceaux de divers compositeurs comme Andrew Jackman, ou encore Richard Hill et bien d’autres, ils sélectionnent plusieurs pièces de Keith Mansfield, mais surtout Brian Bennett. En effet, la B.O. du « Club des Cinq » est en bonne partie basée sur les compositions de ce dernier, tirées de ses albums « Drama Montage » 1 et 2. Sur ces disques se trouvent de nombreux passages typiquement créés pour des situations de suspense, de drames, d’angoisse ou encore d’action. Bref tout ce qu’il faut pour faire une bonne B.O. essentiellement orchestrale, ces passages sont réutilisés de très nombreuses fois tout au long de la série de même que ceux de Keith Mansfield dont la légère musique à la flute a tendance à ouvrir la plupart des épisodes de la première saison. Parfois ce sont seulement les quelques mesures d’introductions des morceaux qui sont utilisés dans la série faisant office de jingles. Plusieurs virgules musicales apparaissent également que l’on retrouve comme toutes les autres musiques dans les disques d’illustration musicale. Entre jazz soft, pop rock, funk et électronique, la B.O. du « Club des Cinq » est un savant mélange de styles et d’arrangements avec au milieu un unique passage expérimental électroacoustique du BBC Radiophonic Workshop. Tous ces éléments ont été parfaitement choisis et collent aux images de manière assez convaincante.

Le succès de la série étant au rendez-vous, la production aimerait en éditer la bande originale. Seulement voilà, le générique de fin ne fait nullement mention des compositeurs ni même des labels d’où sont issus les morceaux utilisés, ce qui est pourtant une obligation. Seul le nom de Rob Andrews apparaît comme compositeur, laissant supposer qu’il est à l’origine de tous les morceaux. De plus l’édition de ceux-ci requiert un contrat particulier avec ces mêmes labels. En effet, quand on achète les disques d’illustration musicale, on a le droit de les utiliser pour pister des films, séries documentaires et bien d’autres médias, mais on a en aucun cas le droit de les rééditer dans le cadre de B.O. des productions créées. Il faut pour cela négocier un nouveau contrat avec partage des bénéfices avec les labels propriétaires des droits. C’est pourquoi la mention « libre de droit » de ces musiques n’est pas totalement vraie. Donc pour le « Club des Cinq », l’édition d’un album est hors de question. Mais par contre la chanson générique ayant été une commande ferme, elle peut donc faire l’objet d’un pressage commercial. Seulement ce titre a été composé pour paraître en deux parties distinctes afin de pister la série. Il faut donc réorchestrer le tout pour que les deux couplets et le refrain puissent former une chanson unique. Un nouvel enregistrement est alors mis en chantier. Contrairement à une idée reçue, les acteurs n’ont JAMAIS interprété la chanson. Ce sont des enfants de la Corona Stage School qui ont été sélectionnés de par leur tessiture vocale pour chanter le titre. C’est donc une version longue contenant les deux couplets qui finalement apparaît sur la face A du 45 tours qui est édité en 1978. Mais sur un disque vinyle, il y a deux faces. Plutôt que de mettre une version instrumentale du titre, que l’on entend pourtant en générique de fin de trois épisodes, une deuxième chanson « Together Again » est enregistrée. Celle-ci qui n’a aucun lien avec la série a été confiée à Keith Hopwood pour les paroles et Malcom Rowe pour la musique. Ce single se vend comme des petits pains en Angleterre comme en France. Mais si la musique ne peut être éditée à l’époque, ce sont pourtant de nombreux 33 tours qui paraissent avec la bande-son d’épisodes racontant alors les péripéties inédites des jeunes aventuriers interprétées par le cast original. Les fans du « Club des Cinq » doivent attendre l’année 2015 pour découvrir enfin la véritable bande originale partiellement éditée sur un CD.

En 2015, c’est Télé 80 qui décroche un contrat avec le label Bruton Music pour éditer en CD les musiques du « Club des Cinq » via le label Balthazar Music. Cette collection très particulière et relativement confidentielle a été créée dans les années 2000 afin de rééditer les musiques de séries et dessins animés qui ont bercé les jeunes années des quadras et quinquas. Ainsi, on a le plaisir de voir les rééditions en CD de plusieurs B.O. devenues rares car sorties en quantité limité en vinyle à l’époque. Avec « Ulysse 31 », « Les mystérieuses cités d’or », « Inspecteur Gadget », « Les maîtres de l’Univers » ou encore « Bomber X », on retrouve donc les musiques qui furent l’objet d’un 33 tours lors de la première diffusion de ces séries. Mais là où Télé 80 fait fort c’est l’édition pour la toute première fois en France de certains titres comme « L’Autobus à Impériale », « Silas », « Matt et Jenny » ou encore « Vic le Viking » et « Nils Holgerson ». C’est avec cette même volonté que Télé 80 décide d’offrir au public pour la première fois la musique de la série « Le Club des Cinq ». Cette édition unique n’est alors disponible QU’EN France. Mais au lieu d’éditer sur deux CDs l’intégralité du score des nombreux compositeurs impliqués, « Télé 80 », via le label Balthazar Music, ne sélectionne que quelques passages. En plus des versions 45 tours des chansons préalablement parues, c’est un peu plus d’une trentaine de pistes qui sont compilés sur un seul disque. On y retrouve des morceaux emblématiques comme l’ouverture de certains épisodes, le passage qui illustre les courses poursuites, celui que l’on entend quand les jeunes héros sont sur la route en vélo, les moments plus aventureux, mais également les parties plus angoissantes. Seulement, le choix de certains morceaux semble être quelque peu hasardeux. Certaines musiques qui sont sur cet album n’apparaissent aucunement dans la série et on se demande bien d’où « Télé 80 » tient la liste de ces morceaux. Néanmoins ce disque est une vraie mine d’or avec les passages qui nous rappellent bien des scènes de cette série TV qui a marqué notre enfance. On se rend alors compte que l’essentiel de la B.O. du « Club des Cinq » s’architecture autour des compositions de Keith Mansfield, Steve Gray et surtout Brian Bennett. Si cette édition, uniquement française, a le mérite d’exister, elle est un peu frustrante puisque nombre de morceaux qui ont marqué notre mémoire en sont cruellement absents. Si l’on veut compléter cette B.O., il faut alors se lancer dans une quête à la limite des aventures d’Indiana Jones. C’est un véritable travail d’exploration et de recherches en tous genres qu’il faut accomplir pour essayer de retrouver les musiques manquantes, ce qui est parfois un véritable casse-tête quand il s’agit de très courtes virgules musicales. Pourtant en se basant sur les divers noms de compositeurs déjà identifiés, on finit par retrouver la trace de beaucoup de passages, notamment en fouillant dans le label Bruton Music, très largement utilisé pour la série. Ainsi pour ne citer que quelques-uns, on retrouve énormément d’extraits issus des albums « Drama Montage » 1 et 2 de Brian Bennett, mais également pas mal de passages dans les disques « Important Project – Wonders of the Worlds », « Driving Force », « Four Seasons / Conutry Life », « Dramatic Action », « Darkside », « Thriller, Suite of the Hurricane », « Advanced Technology », « Menace » ainsi que « Fear » et bien d’autres encore (environ une quinzaine de référence tant chez Bruton Music que chez KPM). C’est d’ailleurs ainsi que l’on découvre que les morceaux apparaissent sur plusieurs aspects, une version complète précède des versions plus courtes servant de jingles. On réalise alors pourquoi les versions d’un même morceau que l’on entend dans la série ont tendance à être différentes.

Que ce soit par la musique ou par les histoires, la série « Le Club des Cinq » a marqué toute une génération de Britanniques tout d’abord, mais également d’Allemands et de français. Le jeune public ayant alors à peu près le même âge que les personnages pouvaient s’identifier facilement à ceux-ci. La série est telle que les personnages sont maintenant indissociables des jeunes acteurs qui les incarnaient à cette époque. La nouvelle série anglaise des années quatre-vingt-dix et les quatre téléfilms germaniques de 2012, bien qu’ayant été bien perçus, n’ont pas réussi à faire oublier la version des années soixante-dix qui demeure très populaire. Plusieurs conventions de commémorations ont lieu tout au long des années, et certains acteurs prennent plaisir à rencontrer leurs fans fidèles. Mais que sont-ils devenus ?

Jennifer Thanisch, qui avait déjà tourné dans des séries avant de connaître le succès avec « Le Club des Cinq » en campant Annie, décide pourtant de tout arrêter après. Retirée du milieu télévisuel, elle poursuit ses études et devient à son tour enseignante dans une école religieuse non sans avoir fondé une famille.

Marcus Harris, pensant que sa prestation dans « le Club des Cinq » en tant que François lui apportera de nombreux autres rôles, découvre alors qu’il n’est pas aussi doué que çà et ne décroche aucun contrat. Il se retire également du milieu et devient par la suite représentant chez un concessionnaire automobile, après avoir fait plusieurs petits boulots, puis crée et dirige une boite d’informatique avant de se lancer dans la politique où il devient conseiller municipal et député de Wallingford. Il revient pourtant à télévision en tant qu’animateur d’un Télé Achat sur une chaîne britannique. Marcus apparaît néanmoins en tant qu’acteur en interprétant le rôle de Brian Davis, un chef enseignant d’un lycée dans la série « Darton High » ce qui lui permet de tourner par la suite dans quelques épisodes de « L’inspecteur Barnaby », dans le téléfilm « Beyond the Golden Compass » et de faire une apparition dans le téléfilm allemand sur le « Club des Cinq » en 2012.

En ce qui concerne Michele Gallagher, l’inoubliable Claude, les informations sont assez nébuleuses, mais beaucoup plus dramatiques. Mais en se basant sur les dires de Gary Russell et quelques témoignages de personnes l’ayant connue, il apparaît que la vie ne lui a pas été heureuse. A l’époque du tournage de la série, Michele Gallagher avait de très gros problèmes familiaux. Gary Russell parle d’un vrai cauchemar continuel pour elle. Retirée du milieu télévisuel, elle arrive à l’âge adulte et se retrouve donc libérée quelque peu de cette vie familiale chaotique. Malheureusement le sort s’acharne sur elle. On lui aurait diagnostiqué une maladie génétique rare. Vivant avec une épée de Damoclès sur la tête, Michele Gallagher fonde néanmoins une famille, mais fait le choix d’une vie relativement dangereuse aimant notamment la vitesse en moto. C’est d’ailleurs un accident avec ce véhicule qui va la paralyser. Clouée alors sur un fauteuil roulant, elle ne supporte pas cet immobilisme. Elle finit par craquer et se donne la mort en 2000.

Celui qui continue sa carrière d’acteur est donc Gary Russell. Il décroche quelques petits rôles par-ci par-là, notamment pour la série éducative « Look and Read » puis dans des courts métrages comme « A Shocking Accident ». Les nombreuses auditions auxquelles il postule lui permettent de retrouver Rupert Graves qu’il connut lors du tournage de l’épisode « Les Cinq et les saltimbanques ». Le talent naturel de Graves permet à celui-ci de décrocher de nombreux rôle aux dépens de Gary Russell qui finit par stopper sa carrière d’acteur non sans avoir fait une courte apparition non créditée dans « Octopussy », l’avant-dernier James Bond de Roger Moore. Gary Russell se consacre alors à l’écriture publiant une douzaine de romans et nouvelles sur « Doctor Who », chose qu’il continue de faire à l’heure actuelle. Il signe également de nombreux scénarios pour plusieurs séries télévisées et justement sur les nouvelles de « Doctor Who », de « Torchwood » et de « Sarah Jane Adventure », tout en écrivant et dirigeant des pièces radiophoniques essentiellement sur le Docteur, mais également sur « Bernice Summerfield » et un « Judge Dredd ». Si sa carrière d’écrivain est quasiment sur Doctor Who, c’est tout simplement parce que Gary Russell est un fan absolu de la première heure. Et s’il a choisi de faire carrière en écrivant autant sur ce personnage, c’est peut-être dû à une rencontre faite sur le tournage de l’épisode « Les Cinq prennent la fuite ». Parmi tous les acteurs et actrices qui sont invités à jouer les méchants de service on trouve quelques stars et dans cet épisode en particulier, on a le plaisir de retrouver Patrick Troughton, l’inoubliable deuxième docteur de la série classique « Doctor Who ». Gary, excité comme une puce à l’idée de rencontrer le deuxième Docteur, voit son enthousiasme réfréné par les producteurs. Ceux-ci lui expliquent d’éviter d’aborder le sujet avec l’acteur qui a laissé cette période de sa vie derrière lui. Rongeant son frein, Gary Russell reste alors à l’écart pour ne pas commettre d’impair. Néanmoins, à la fin du tournage de cet épisode, Patrick Troughton, ayant appris que le jeune acteur était fan de « Doctor Who », va vers lui pour discuter de son sujet préféré. Nul doute que cette conversation passionnée ait pu influencer Gary Russell dans son choix de carrière par la suite.