James Mangold compose le requiem de Wolverine

C’est en 2000 que le cinéma connait une nouvelle ère avec un genre complètement renouvelé. Les super héros sont enfin dignement mis en valeur grâce à Brian Singer qui nous livre « X-Men » point de départ d’une franchise à succès. Ce film pose les bases de ce qui deviendra un genre à part entière : les films de super héros. Parmi les personnages de ce premier opus se détache l’anti héros par excellence, Wolverine qui starise l’acteur australien Hugh Jackman. Dix-sept ans plus tard, le comédien fait ses adieux de la plus belle des manières à Wolverine en passant le flambeau à la jeune génération.

Un Wolverine diminué.
Le troisième volet des aventures de Wolverine coupe littéralement les ponts avec le reste de l’œuvre cinématographique des X-Men. Le héros est l’un des rarissimes mutants à parcourir encore la Terre, l’école de Xavier n’existe plus et Wolverine travaille pour vivre. En d’autres termes, Logan est tout sauf un film de super héros et encore moins un film X-Men.
En 2029 les mutants ont quasiment tous disparu. Logan loue ses services en conduisant une limousine et sert ainsi de chauffeur à qui a besoin d’un tel véhicule pour égayer les soirées. Habitant en plein cœur du désert mexicain, Logan survit tant bien que mal avec son pouvoir autoguérisseur sévèrement affaibli dû à la présence de l’adamantium qui l’empoisonne lentement depuis des décennies. Ayant recueilli Charles Xavier, il s’occupe de lui qui, âgé maintenant de 90 ans, perd de sa lucidité et provoque de régulières catastrophes télépathiques faisant ainsi de nombreuses victimes. Cette vie tranquille se voit bouleversée avec l’apparition d’une fillette de 10 ans, première d’une nouvelle génération de mutants. Son existence, directement liée à une organisation secrète va replonger Logan dans une nouvelle bataille tout en essayant de protéger le maintenant sénile et capricieux professeur X.
Un long voyage débute pour trouver les autres nouveaux mutants et il se pourrait que pour Logan ce soit la dernière chevauchée de Wolverine qui doit faire face à une version rajeunie de lui-même.

Un drame humain
Avec un tel scénario, le film ne pouvait pas avoir un contexte super héroïque. James Mangold livre avec Logan un road movie dramatique avec quelques scènes de violence qui illustrent parfaitement le côté bestial des deux personnages principaux, ce qui était toujours édulcoré dans les différents opus précédents. Mais les moments les plus forts demeurent, non pas ces passages sanglants, mais les scènes intimistes, notamment avec le vieillissant professeur Xavier devenu sénile et ne contrôlant son pouvoir que sous l’emprise d’une drogue. Tout au long du film, on prend conscience de ce que l’on nomme « la fin de vie ». On ne peut s’empêcher de réaliser que l’état de l’ancien professeur Xavier peut nous arriver dans les décennies à venir. Certes, il y a des moments cocasses, mais l’ensemble donne sérieusement à réfléchir.

Certains crieront au sacrilège quand ils découvriront à quel point leur héros est diminué. Le réalisateur fait un pari fou en faisant de Logan un personnage fatigué dont le pourvoir curatif a pratiquement disparu et a même du mal à sortir ses griffes. Ajoutez à ça que Wolverine boite et vous obtenez un héros blasé et las de tous les combats qu’il a menés.
Hugh Jackman exécute une remarquable prestation pour sa dernière interprétation en tant que Wolverine. L’alchimie prend avec en face Patrick Stewart qui campe un Charles Xavier méconnaissable et sénile, mais qui sort quelques réflexions philosophiques bien pensées sur ce qui est « une vie normale ».

Si les « méchants » ont de la présence, notamment avec le cyborg Donald Pierce, c’est surtout le personnage de Laura Kinney qui séduit. Campée par la toute jeune Dafne Keen, X-23 passe de l’innocence lors de la découverte du monde à la sauvagerie animale lorsqu’elle sort ses griffes. Il est clair que cette actrice en devenir s’est amusée comme une petite folle à jouer les mini Wolvie. Si Laura n’est absolument pas loquace au début elle devient très vite volubile par la suite. Les fans de comics X-Men retiendront les noms qu’elle liste à vitesse effrénée qui n’est pas sans rappeler ceux des Nouveaux Mutants. L’interaction entre Logan et Laura fonctionne et très vite une relation père-fille s’installe ce qui accentue alors la dramatique conclusion du film.

Adieu Wolverine
On note que pour Logan, le réalisateur a plus misé sur le jeu des acteurs que sur la débauche d’effets visuels. Certes, çà découpe, çà tranche, çà décapite, mais ce n’est pas le nerf du film. Peu d’effets spéciaux donc, puisqu’en fait d’un film de super héros, on assiste à un drame humain et un road movie qui n’est pas sans rappeler Firestarter par certains côtés. Ce choix est d’autant plus audacieux quand on sait que la présence de Dents de Sabre initialement prévue a été finalement écartée.

Hugh Jackman et Patrick Stewart disent adieu à Wolverine et au Prof X dans un magnifique requiem orchestré par James Mangold