Cette semaine nous allons donc évoquer la B.O. d’une série qui regroupe quatre autres préalablement produites. Avec Defenders on réunit les personnages déjà mis en place dans leur séries respectives, une pierre de plus à l’univers Marvel partagé connu maintenant de tous sous le label MCU (Marvel Cinematic Universe). Avec ce concept d’univers partagé lancé tant au cinéma que sur le petit écran, on se retrouve plongé dans quelque chose de très vaste et interconnecté. Après avoir conquis les écrans ciné avec la franchise Avengers et consorts, Marvel adapte le concept avec la plateforme Netflix pour Defenders. Mais pour cela, ils mettent d’abord en scène les différents protagonistes dans leur propre série avant de les réunir dans celle-ci. Chaque série a son héros, son atmosphère propre et donc, il faut développer ce concept autour de çà. Avec « Daredevil », « Jessica Jones », « Luke Cage » et « Iron Fist », (et Punisher entre temps) Marvel bâtit un univers bien à part, mais pas entièrement déconnecté du MCU. Je vais donc évoquer la B.O. de la série qui réunit les quatre héros précités, puisqu’elle a eu le privilège de sortir non seulement sur les plateformes de téléchargements, comme toutes les autres séries, mais aussi en vinyle ce qui est beaucoup plus élitiste, mais de bien meilleure qualité sonore.

Comme pour les films cinémas, les musiques d’une série TV se doit d’être à la hauteur et de coller aux images. Si on se souvient de nombreux génériques tant ils sont emblématiques, on se rappelle de temps en temps quelques musiques intérieures tant elles ont marqué certaines scènes. Les musiques de séries télé nous marquent peut être plus que celle des films cinéma compte tenu des réutilisations répétées tout au long des épisodes, mais aussi par les multidiffusions de ces mêmes séries. Les B.O. de séries sont devenus tout au long de ces dernières années tout aussi recherchées que celle des films en salle et que les fans cherchent à réécouter, n’hésitant pas à se procurer des intégrales. Depuis près de quinze ans maintenant ce sont des labels comme Intrada et La La Land records qui se taillent la part du lion dans le marché des soundtrack de séries en éditant de nombreux CD. Mais ce qui est surprenant c’est l’arrivée de certains titres du petit écran en vinyle grâce à d’autres éditeurs, plus audacieux comme Mondo Tees par exemple.

Pour ses séries diffusées sur Netflix, Marvel fait le choix d’instaurer une atmosphère musicale propre à chacune d’entre elles. Ainsi chaque série a son compositeur attitré, donnant ainsi une identité sonore particulière. Pour « Daredevil », on fait appel à John Paesano qui livre une musique électronique teintée de sons orchestraux le tout ponctué de séquences discrètes. L’atmosphère de « Jessica Jones » est complètement différente et Marvel choisit alors Sean Callery qui livre une série de thèmes qui varient entre jazz soft et électronique pur nous rappelant qu’il est issu du milieu de jazz. C’est un univers radicalement différent qui doit être mis en avant avec la série « Luke Cage ». Avec Adrian Younge et Ali Shaheed Muhammad, la musique est un judicieux équilibre entre musique électronique et rythmes hip hop qui soutiennent les thèmes. Avec « Iron Fist », la musique est beaucoup plus convenue. Avec Trevor Morris, on choisit une valeur sure pour une musique essentiellement électronique qui s’étale sur plusieurs thèmes avec des sons là aussi savamment choisis. Avec ces quatre titres, Marvel nous livre une œuvre unique. Quatre ambiances différentes sont mises en place, mais pourtant il y a une cohésion entre elles. L’emploi de sons électroniques similaires donne alors à l’ensemble une identité unique … un univers musical partagé. Mais quand « Defenders » est mis en chantier, il faut alors penser à créer une musique qui doit être un équilibre entre les différents genres mis en place dans les séries précédentes. Chaque personnage a son ambiance et il faut alors mettre en place une identité sonore qui rappelle chacune de celles des protagonistes. Plutôt que de choisir un nouveau musicien qui serait alors parti sur une partition vierge avec les bases des autres musiques comme point de départ d’inspiration, les producteurs optent pour réutiliser John Paesano, compositeur de la musique de « Daredevil ».

Originaire de Birmingham dans le Michigan (donc aux USA et non en Angleterre), il étudie très tôt le piano dans sa ville natale puis part au conservatoire de Paris et suit les cours et notamment ceux de la concertiste Sally Dow Miller. Il complète ses études en musique au Berklee College of Music à Boston, l’une des plus grandes écoles de musique privées des USA avec près de 460 professeurs pour 3800 élèves. Parmi ses professeurs se distingue un certain Pat Petheny. Quand John Paesano commence sa carrière, il travaille d’abord aux côtés de prestigieux compositeurs de soundtracks comme Jerry Goldsmith ou encore John Williams, ce qui lui apporte une expérience solide dans la composition de musique de film. Son premier travail est la B.O. du téléfilm d’animation « Ben 10, le secret de l’Omnitrix » en 2007. Il se distingue sur les musiques de « Superman / Batman : Apocalypse » ou encore « l’âge de glace : un Noël de Mammouths ». C’est avec la musique de la série d’animation « Dragons » que Paesano reçoit le Annie Award, prix décernés par la profession du cinéma américain pour les films d’animation. Il est récompensé par le World Soundtrack Award prix cinématographique centré sur les musiques de film, pour son travail sur « Le Labyrinthe » ce qui le conduit à être le compositeur pour la trilogie. C’est en 2015 qu’il est contacté pour la musique d’une toute nouvelle série Marvel, première pierre d’un édifice d’univers partagé « Daredevil ». La musique qu’il livre est telle que les producteurs décident de lui faire confiance pour la B.O. de « Defenders », série réunissant les quatre super héros Marvel mis en place par leurs séries respectives avant de se rencontrer pour protéger New York d’une organisation criminelle, « La Main », déjà bien représentés dans les séries individuelles.

Marvel’s The Defenders

 

Pour « Defenders », John Paesano reprend les ingrédients de son travail, sur « Daredevil » et l’étoffe quelque peu avec ceux issus des autres titres. Il compose une série de thèmes et d’ambiance électronique parfois subtils et parfois beaucoup plus rythmés. Le savant mélange des sons analogiques et numériques est plutôt bien dosé et le tout a une cohésion qui tient la route. Les séquences subtiles oscillent entre des sons cristallins et de piano avec de temps en temps quelques basses qui pour une fois ne viennent par assourdir l’ensemble. Ce sont également des ambiances assez envolées qui s’invitent afin de donner une certaine légèreté soutenant ainsi l’aspect aérien du personnage de Daredevil. Il insuffle un léger côté jazzy afin d’illustrer les moments de « Jessica Jones », il rajoute quelques rythmes hip pop subtilement en arrière-plan pour imposer la présence de « Luke Cage » et reprend l’ambiance convenue électronique qui accompagne les scènes avec « Iron Fist ». L’équilibre des différents styles des séries individuelles se marie remarquablement valorisant l’ambiance globale électronique et orchestrale qui devient alors l’identité propre des « Defenders ». Avec cette B.O. John Paesano confirme son statut de compositeur de musique de film et séries TV.

Si toutes ces B.O. des séries « Daredevil », « Jessica Jones », « Luke Cage » et « Iron Fist » sont sorties sur les plateformes légales de téléchargements, elles ont eu le privilège d’être éditées en vinyle grâce au label devenu mythique Mondo Tees. C’est également une série de singles qui voit le jour peu de temps après. Il n’est donc pas surprenant que Marvel et Netflix s’associent de nouveau avec cet éditeur pour sortir la B.O. de « Defenders ». Si celle-ci est disponible sur toutes les plateformes légales de téléchargement, elle paraît en vinyle en avril 2018 sur un double album pressé sur des disques 180 g en couleurs de quoi ravir les oreilles des audiophiles.

John Paesano est donc un compositeur qui commence à être reconnu ne serait-ce que par ses awards, notamment avec la musique de la trilogie « Le Labyrinthe ». Il est alors sollicité pour de nombreux autres projets et pour continuer à travailler dans les meilleures conditions, il crée les studios Mad Olive Productions, vaste complexe permettant d’enregistrer les musiques dans des conditions optimales. Parmi ces productions, on trouve plusieurs B.O. de films ainsi que de séries télé ou de films d’animation, mais également plusieurs musiques pour des jeux vidéo, ce qui est un travail complètement différent. Et parmi ces réalisations, on compte « Détroit : Become Human », « Mass Effect, Andromeda » mais aussi un titre Marvel « Spider-Man PS4 ».

Comme quoi, le monde a beau être vaste, l’univers a beau être immense, tout se recoupe.