Alors cette fois-ci je vais vous parler non pas de musique de films, ni de séries TV et non plus d’un groupe de rock. Je vais vous parler de la musique d’un des jeux vidéo les plus populaires de la planète.
Avec un titre comme « Grand Theft Auto », le monde du jeu vidéo a été profondément marqué et de manière indélébile. Si ce jeu existe maintenant depuis 20 ans il a évolué au cours du temps avec la technologie. Que ce soit avec le visuel ou avec le son, un soin tout particulier a été mis sur le produit global. Mais l’un des aspects particuliers de cette licence « GTA » est sans nul doute la musique qui, cours des versions s’est enrichie notamment avec le concept des stations de l’auto radio de la voiture du joueur. Mais c’est surtout la musique d’ambiance du jeu qui est devenue au fil du temps culte avec notamment la présence de compositeurs connus, voire même des stars.
C’est avec cette musique à mi-chemin du rock et de l’électronique, on comprend que la B.O. de « GTA 5 », est une VRAIE B.O., car un jeu vidéo est, au même titre qu’un film, ou une série ou même un dessin animé, une réalisation à part entière qui demande là aussi une ambiance sonore et une musique originale spécialement composée. S’il y a des éditions de bandes originales de films et de séries, il n’y a pas de raison de ne pas faire de même pour les jeux vidéo. En effet, si l’on cherche bien, on peut trouver de nombreuses éditions CD de jeux. Mais c’est néanmoins assez rare et c’est souvent assujetti au succès du titre. On voit alors arriver des B.O. comme « Atlantis » par Stéphane Picq et Pierre Esteve ou encore « Final Fantasy VII » de Nobuo Uematsu, « Silent Hill » de Akira Yamaoka « , « Ori and the Blind Forest » de Garth Coker ou encore « The Legend of Zelda » de Koji Kondo parmi tant d’autres pépites.

Je ne vais pas vous parler du jeu, car ce n’est pas le sujet, et parce que je n’y connais rien, mais on peut néanmoins mettre en évidence l’atmosphère violente due au monde du crime qui est le nerf central du titre. Le joueur incarne un des protagonistes prévus afin de réaliser des … missions … que l’on peut qualifier de … course au dollar. Très complexe dans sa conception de l’univers dans lequel se déroule « GTA », la qualité est au rendez-vous tant visuellement que sonore.

Quand le jeu « GTA » a été mis en chantier, il parut évident que l’atmosphère globale devait être vive et violente jusqu’à la musique d’ambiance … la bande originale.
Il suffit de se plonger dans un jeu vidéo quelconque pour se rendre compte que la musique est de plus en plus en phase avec ce qui se passe à l’écran. Pour la franchise « GTA », le concept est assez soigné. Si l’on entend des chansons très connues issues d’un autoradio, la musique d’ambiance est très étudiée pour coller à l’action. Pour « GTA 5 » le concept va plus loin. On fait appel à plusieurs compositeurs pour élaborer une B.O. homogène malgré la différence de styles des musiciens impliqués. C’est un travail collaboratif qui va en résulter pour quelques bases de thèmes communs sur lesquels chacun va développer sa partie … Un première dans ce genre de travail. C’est donc cet équilibre de styles entre rock, hip-hop et électronique qui va germer pour la musique de « Grand Theft Auto V ». La production a alors l’embarras du choix en ce qui concerne les compositeurs. C’est lors de la conférence officielle que les musiciens sont alors présentés au public. Si Woody Jackson est en charge de coordonner et finaliser le tout, on a la surprise de trouver Ivan Pavlovitch, Alan Daniel Maman, Oh No et Edgar Froese. Cette équipe improbable va lors composer une musique majoritairement électronique due à la présence de Froese qui va signer environ 80% des musiques d’ambiance.

Woody Jackson n’est pas néophyte dans l’univers du jeu vidéo puisqu’il est sur des titres comme « Red Dead Redemption », « L.A. Noire » ou encore « Max Payne 3 ».

Ivan Pavlovitch lui, travailla comme directeur musical et compositeur additionnel sur de nombreux autres jeux comme « Midnight Club : Los Angeles », « The Warriors », « Manhunt 2 », mais également sur les mêmes titres que Woody Jackson et il n’est pas étranger aux versions précédentes de « GTA ».

Alan Daniel Maman est plus connu sous le nom de The Alchemist, producteur, DJ et musicien à qui l’on doit de nombreux albums comme « Chemical Warfare » ou « Russian Roulette », ainsi que des albums d’illustrations musicales comme « Action-Drama » ou encore « Gangster Theme Music ». Il collabore avec de nombreux artistes parmi lesquels on retiendra Prodigy ou plus récemment Oh No qu’il retrouve ici pour « GTA 5 ».

Oh No de son vrai nom Michael Woodrow Jackson est un artiste Hip Hop qui signe de nombreux albums comme « The Disrupt », « Dr No’s Oxperiment » ou encore cette année « Ultimate Breaks and Beats ». À noter qu’il est le fils du chanteur Otis Jackson et le neveu du trompettiste de jazz Jon Faddis.

Quant à Edgar Froese, je vous en ai parlé longuement il y a quelque temps. Décédé en janvier 2015, il fut le créateur et le pilier du groupe berlinois Tangerine Dream, qui durant 50 ans a innové en amenant des sons nouveaux à la musique avec l’apport des synthétiseurs qui ont évolué notamment grâce à ce groupe. Tangerine Dream est à la tête de 136 albums et 67 singles sans compter des dizaines de musiques de film dont la plupart demeurent encore inédites. Je vous invite relire l’article sur Tangerine Dream pour faire connaissance avec ce groupe mythique.

Cette équipe pour le moins inédite va alors composer et livrer une musique assez homogène avec un thème commun, mais avec les styles qui vont distinguer chacun d’entre eux. Si l’on entend quelques morceaux hip-hop ainsi que quelques passages plus rock, c’est surtout la partie de Tangerine Dream qui est omniprésente dans l’ambiance du jeu. Essentiellement électronique, la musique est très séquencée, mais parfois plus clame et ambiante. Ceux qui jouent à « GTA 5 », ont dû remarquer l’incroyable palette de variations sur une même musique. Pourtant il s’agit du même morceau. Seulement le jeu est conçu de manière à ce que tous les morceaux soient présents en multipistes. Chaque ensemble d’instruments et de rythmiques se retrouve isolé. On se retrouve avec parfois 8 fichiers de même longueur avec les séquences dans l’un, les batteries dans l’autre, les rythmiques dans un autre et plusieurs thèmes séparés également. C’est suivant les phases du jeu que certaines pistes sont activées et d’autres non. C’est en variant les pistes choisies que l’ambiance change au cours de l’action.
Cette technique va alors contribuer à faire de la B.O. de GTA 5, quelque chose de particulièrement spécial.

Le succès mondial du jeu est tel que Rockstar Games décide d’éditer la musique de GTA 5 en un coffret collector de 3 CDs qui regroupe tout d’abord des musiques spécialement composées pour la partie stations de l’autoradio du jeu. Le deuxième CD contient une partie de la musique d’ambiance composée par l’équipe dont on vient de parler, ce qui nous permet de voir la différence de style sur un thème relativement commun. Quant au 3ème CD on trouve une sélection de chansons compilées que l’on retrouve également sur les stations de l’autoradio.
Mais si l’on y trouve un livret explicatif plutôt bien fourni, on a la grande surprise de découvrir une clé USB en plaqué or en forme de lingot. Un coffret magnifique qui se voit décliner en box 6 vinyles couleur avec en prime un poster géant, mais sans la clé plaquée or. Deux objets collector hors norme. Une première dans l’édition de B.O. de jeux. Les boxes se trouvent encore sur le net notamment sur les plateformes de vente habituelles, mais comme ils datent un peu, leur côte a quelque peu grimpé et on trouve le box 3CDs à partir 90€ quant au box 6 LPS, il faut déjà compter à partir de 120€ et ça monte très vite.

Parallèlement Eastgate Music, le label de Tangerine Dream décide d’entamer une série « Cinématographic Score » avec tout d’abord un nouvel enregistrement de la B.O de « Sorcerer » (le convoi de la peur 1977), mais aussi avec un mixage personnel de certains morceaux pour l’album « The Cinématographic Score of GTA5 ».

Le monde du jeu vidéo est assez vaste ce qui permet de découvrir des univers réalistes ou fantastiques. Mais à chaque fois on y trouve des musiques d’ambiance de plus en plus à l’image du jeu qu’elle est censée illustrer. Ainsi quand un jeu est médiéval, la musique peut l’être aussi. De véritables œuvres symphoniques peuvent apparaître notamment sur des jeux oniriques, l’aspect traditionnel n’est pas en reste non plus sans parler de la musique électronique.
Mais la création d’une musique pour un jeu vidéo n’a pas été toujours de tout repos et parfois les éditeurs font appel à de grands noms. En 1988, le label français Exxos demande à Jean-Michel Jarre d’utilise une partie du morceau « Ethnicolor » issu de l’album « Zoolook » pour le thème de leur nouveau jeu « L’Arche du Captain Blood ». À partir de là, les éditeurs de jeux comprennent alors l’importance d’un nom pour la musique. On trouve donc par la suite des noms comme Afro Celts Sound System pour le jeu « Arcanes », mais aussi trois ex-membres de Tangerine Dream tels que Christopher Franke pour les jeux sur « Babylon 5 », Michael Hoenig pour « Baldur’s Gate » et Paul Haslinger sur des titres comme « Need for Speed Undecover » ou encore « Rainbow 6 Vegas ».
Mais parfois on découvre des noms improbables pour la musique de jeux vidéo par exemple avec la musique de « Sentinel Returns », jeu de puzzle 3D datant de 1998 conçu par Geoff Crammond et dont la B.O. est signée par un certain John Carpenter. Ne cherchez pas un CD de la musique chez un disquaire, vous ne le trouverez pas. Le seul support physique officiel est un CD donné en cadeau dans le numéro 88 du magazine français « Player One » paru en 1998. À noter qu’un vinyle Pirate a été aperçu l’année dernière.

Comme quoi, le monde a beau être vaste, l’univers a beau être immense, tout se recoupe.